Vases communicants: Camille Philibert-Rossignol

Ballade pour Maryse Hache.

J'aurais pu remarquer les baies rouges et fleurs blêmes, profusions échevelées se déversant des arbres des jardins que je longe d'un pas alerte. Un jogger croisé ainsi que deux petits enfants trainés par leur grand-mère. Quand j'arrive au Parc revient brouillée la silhouette d'un homme qui fumait en descendant quelques marches, dégaine entraperçue à la résidence La Fontaine. Point de départ.

( fumait, lien http://www.les807.blogspot.fr/2012/05/floche.html)

Au Parc, se défaire fissa des murs qui m'entouraient, l'appartement aussi faux abri que faux ami. Au milieu de la verdure, une rivière revoit le jour. Il pourrait être amer, ce flux boueux, vaseux, stagnant en fine couche sur un long aplat de béton, eau sombre charriant quelques cailloux et s'insinuant entre vert et ocre, stries d'herbes courtes ou trainées argileuses. Bordant la rivière, une large pelouse aux brins verdoyants dont le parfum piquant se dilue dans la brise fraiche jusqu'à faire frémir mes narines. Elle s'élargit sur une vingtaine de mètres. De gras bosquets aux feuilles à éraflures la longent, ainsi que des saules pleureurs. Sont-ils aussi doux que leurs lianes le semblent, quand épaisses et aérées ou bien nues, elles se balancent dans la brise, s'inclinent précisément dans la lumière dorée, milles et un rubans oscillants sur le même lent tempo ?

( amer, lien http://www.les807.blogspot.fr/2012/09/amer.html, ruban lien http://www.les807.blogspot.fr/2012/07/ruban.html )


Vif, le vert d'herbe, il s'étend au delà du décrochage bétonné qui traverse tout l'espace en contre-bas. Sur toute sa longueur, un fin filet d'eau s'y traine, y flaque d'ici à au delà. Contigue, l'étendue herbeuse jusqu'à un promontoire où elle se plie en trois haute marches. Pour aboutir sur un grillage et derrière j'imagine un chemin qui y passe, puisque deux petits marcheurs et un chien minuscule avancent en ligne. Quelques peupliers grisâtres ceinturent le fin fond du Parc, dont je n'aperçois qu'une trouée, cernée que je suis par deux larges masses de saules. Aiguisées, leurs branches verticales me cachent autant l'entrée que la sortie vers le bassin de recyclage. Leurs troncs sont verticaux et sobres, tandis que les ramures se caractérisent par des traits chaotiques, longs hameçons tremblants dont les mouvements hypnotiques ne ramènent aucune prise. Pendant un instant un rayon solaire allège les futaies molles, un corbeau apparaît, aussi furtif qu'un dernier expire. Sur la jetée qui surplombe la rivière, un tag tracé à la peinture blanche : Dieu a un plan pour chacun, l'enflure.


Dans le pavillon de mon oreille gauche vrombit un ronronnement mécanique qui s'accentue, décroit, s'efface. Dans celui de la droite un pépiement aigu, sec, note suspendue dans l'air entre deux silence, un pépiement, répètition. Quand avec le vent vaguelettes de frottements, les feuilles résonnent de concert. Longue plainte grave d'une moto filant vers Fresnes. Les bruits flous des végétaux se déploient quand ceux des moteurs se dessinent nettement. Son froissé des graviers écrasés par les baskets des joggers, halètements secs du clebs à la balle rouge dans la gueule. Traversées par un souffle, les feuilles argentées des bouleaux crépitent, bien plus crissantes que celles des saules, quand derrière moi une mélodie criarde fait se décrocher un portable. - Ah oui, ah bon, dans le four répond une voix perchée. Plus tard, silence revenu, plus tard les futaies s'animent les unes après les autres avec délicatesse quand le grondement étouffé d'un avion écrase les autres sons.

Longeant les buissons taillés, les sapins bleutés, les mimosas encore fleuris et les flèches barrées, ma promenade se replie et mes épaules se recroquevillent. Point final. Quelques trouées de lumière cependant quand s'éloigne le zigzag d'un enfant après une un détour à la boulangerie.

( mimosas, lien http://www.les807.blogspot.fr/2012/01/mimosa.html)




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